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26 avril 2016

Nos friches numériques

On ne félicitera jamais assez le Grésivaudan d’agir avec continuité pour la revalorisation des friches industrielles (voir Journal du Grésivaudan, mars 2016). La friche, terre laissée à l’abandon, témoigne d’une fuite en avant et d’une négligence collective coupable.

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                                                                                                                                       Photo IRMA / Sébastien Gominet

Comme le randonneur malotru, heureusement en voie de disparition, qui avait la force de monter aux alpages et vers les cimes avec son repas et la flemme minable d’en redescendre les reliefs, nous voici constructeurs invétérés, mais démolisseurs aux abonnés absents. La plus grande honte du pays est la friche dite TOTAL, ATOFINA (qui se cache aujourd’hui sous le nom de friche FREDET), sur les communes de Froges et Villard-Bonnot.

Honte à nous, citoyens, dont la passivité a donné champ libre aux pollueurs pour décamper sans emporter leurs restes. Maintenant, il y a prescription, ou tout comme. Privatisation des bénéfices, socialisation des pertes, c’est la base du capitalisme. Nous y sommes. Grésivaudan, retrousse-toi les manches et sort le chéquier. Faut banquer. C’est dommage, mais faut banquer. Le terrain est bien placé, près du train électrique, sans risque d’être gêné par le bruit (les trains ne sont pas si nombreux).

J’espère que nos zones commerciales démesurées ne tourneront pas trop vite en friche. J’avoue que je le crains un peu.

Mais plutôt que de s’inquiéter, mieux vaut apprécier à sa juste valeur la portée immense de la notion de friche. Le passif abandonné qui s’incruste, végète, occupe l’espace et revit sous des formes surprenantes, sordides et créatives. Pensons à Tchernobyl avec ses friches inégalées, au moins jusqu’à la prochaine fois, l’aventure nucléaire n’est pas finie … 

Oublions l’industrie, élargissons le propos. Nous sommes, paraît-il, à l’ère du numérique. Et ça ne fait que commencer !

Que sont nos friches numériques ? J’en ai fait la cruelle expérience récemment. Un lecteur indésirable trouva sur ce blog une surprise, de quoi déclencher son ire à mon égard. Si les détails sont secondaires, l’anecdote est éclairante. Le texte exploité par mon bourreau est de peu d’intérêt en lui-même. Mais il tissait un lien (c’est le propre de la toile) dont on pouvait tirer une preuve comme le font si bien les complotistes. Voilà la friche : un amas, un fatras de textes et d’images accumulés au cours des ans, jamais nettoyés et qui font le terreau de toutes les cultures, curieuses, philanthropes ou mafieuses.

Depuis bientôt 5 ans, nous avons publié plus de 300 notes sur www.lecrollois.fr. Que vont-elles devenir ? Comment peuvent-elles fructifier sans polluer ou rancir ? Alors, bibliothèque, jachère ou friche ? La frontière est ténue.

Le problème de l’infobésité est connu. C’est une affaire de flux. Mais la question du stock va aussi devenir critique. Même combat que pour le logement. Le regard est porté sur le flux de constructions neuves, mais on ferait bien de jeter un œil aussi sur l’ancien qui décrépit et tourne à la zone. La friche, c’est le vent qui masque la forêt. Nous vivons une époque moderne, nous aimons le mouvement, le changement. L’actu chasse l’actu. Alors, s’occuper de l’ancien, tu parles !

Dans cette nasse, je ne suis pas seul avec les compères du crollois. Autour de moi, je vois bien que la mise à jour n’est pas le fort des webmasters.

Choisissons au hasard un site de bonne facture, réputé et à l’audience établie. Qui peut me garantir que www.ville-crolles.fr n’est pas peuplé de minuscules friches, invisibles pour l’habitué mais qu’un œil averti détecte aisément ?

J’ai déjà cité, dans un billet récent, le DICRIM (document d’information communale sur les risques majeurs) qui nous annonce des travaux devant être lancés prochainement pour la digue du Fragnès, prochainement « en 2010 » … Au titre des friches naissantes, il y a surtout l’agenda 21, figé en 2012. Nous avions donc raison, c’était l’agenda 12. Avec le recul on peut le dire, nous l’avons pris comme souffre-douleur pendant quelques mois. Nous n’étions pas vraiment gentils camarades. Le voilà qui s’enfonce dans l’oubli, les fichiers sont maintenant endommagés. Je n’irai pas jusqu’à le réhabiliter, il est encore trop tôt, mais l’oublier, jamais ! Et si le maitre du web de la ville s’avisait de le faire disparaître, nous serions là pour en transmettre la mémoire aux générations futures.

Allez, encore une friche sympathique, peu connue, difficile d’accès : http://www.ville-crolles.fr/vie-municipale/arretes.php.... Jetez-y un œil. Vous verrez que le maire, en 2009, a pris un arrêté d’interdiction de camping sauvage sur le skatepark et le parc Jean-Claude Paturel de la commune de Crolles. C’est l’arrêté le plus récent … mais n’allez pas croire que le maire ne fait plus rien depuis 2009 !

La friche numérique, on l’aime ou on la quitte, elle survit et se transforme, rebelle.

Francis Odier, 25 avril 2016

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