Le Crollois

A Crolles, en Grésivaudan, beaucoup en sont convaincus. Il n’y a pas d’autre politique que celle menée actuellement.

« Entre nous, les choses vont plutôt bien, pourquoi tant de critique ?! » Voilà ce qu’entend, voilà ce que doit endurer le minoritaire marginal qui a l’idée saugrenue et prétentieuse de se livrer à la revue des pratiques politiques communales.

Et c’est vrai : Entre nous, ici, les choses vont plutôt bien. Voulez-vous que je le répète jusqu’à l’écœurement ? Les choses vont plutôt bien … et, pour être complet, il faut ajouter : vont plutôt bien … pour nous crollois, pour nous qui bénéficions de la prospérité locale, d’équipements magnifiques, d’un cadre de vie enchanteur, d’une tradition associative toujours renouvelée. 

Nous n’avons pas le choix. Seule une bonne dose de curiosité et d’exigence démocratique, d’exigence morale (n’ayons peur ni du mot, ni du concept) peut nous extraire du contentement douillet que l’on perçoit sans peine autour de soi.

La pensée unique – pourquoi tant de critiques ? - est tout sauf folle. Elle traduit un consensus entre les dirigeants et le bon sens populaire. Elle explique le passé (nous avons bien travaillé, disent-ils), justifie le présent (nous pouvons leur faire confiance) et rassure sur le futur (on va continuer sur une belle trajectoire).

Les doutes et les suggestions ne peuvent éclore que dans un mouvement critique circulaire, avec du relief et du contraste : s’intéresser à la fois aux détails terre-à-terre et aux concepts stratosphériques, sortir de la ville et regarder ailleurs, s’inspirer d’autres champs d’action que la politique. Au premier regard, on ne voit rien. Il faut gratter, creuser, labourer, usiner, se retourner, virer à gauche, s’échapper à droite, oublier la gauche et la droite, s’intéresser au fond, aussi profond soit-il.

Pour dire les choses simplement, comme dans ce tract diffusé à l’entrée des Etats Généraux, en avril 2010 : « Nous avons une démocratie de convivialité, il faudrait aussi une démocratie de dossiers ».

Parmi les esprits critiques qui survivent, certains se piquent d’indignations, d’autres de colère froide et tous se nourrissent d’utopies pratiques. Chacun porte confusément ses idées et ses méthodes alternatives. Nous sommes dans le désordre, le foisonnement et le chaos nécessaires avant toute régénération. 

Seul le passé peut éclairer le devenir. Les régimes totalitaires et les sectes l’ont bien compris, eux qui prétendent du passé faire table rase.

Je reste étonné que le droit d’inventaire, revendiqué par Lionel Jospin à l’endroit de son illustre aîné, ait paru à l’époque une audace inouïe, presqu’une traitrise, un parricide, alors qu’il ne s’agissait que d’appliquer en politique ce retour d’expérience bien connu des entreprises, des militaires, des formateurs, des sportifs … bref, de tous ceux qui ont un tant soit peu le souci du progrès.

En bonne gouvernance (on peut rêver …), l’évaluation et le retour d’expérience sont des processus formalisés, pérennes, s’appuyant sur des acteurs autonomes, libres de leurs méthodes et de leurs avis.

Mais ne soyons pas puristes. Je ne vais pas définir le système qualité de la démocratie locale. A défaut d’évaluation permanente et structurée, ce à quoi contribue lecrollois.fr, en toute modestie, convenons que l’élection est le moment du bilan.

Je milite pour le devoir d’inventaire.

Francis Odier, 2 mars 2014.