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19 mars 2013

Communication de documents administratifs : une gifle infligée à Crolles

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C'est bien une calotte que le tribunal administratif de Grenoble a infligée à la commune de Crolles récemment...

On savait les zélés zélus peu enclins à la participation réelle du public : le juge lui rappelle ici qu'il y a des limites au secret des décisions ... qu'il ne faut pas franchir... parce que c'est simplement illégal.


Une grande habitude de la participation baFFouée

Le Crollois a déjà souvent eu l'occasion d'alerter ses lecteurs sur l'insuffisance manifeste de l'action communale en matière de participation du public. Alors qu'il s'agit là d'un droit fondamental, protégé par la Constitution et la Charte de l'environnement, Crolles continue à brandir un agenda 12 pour montrer qu'au pays des Bisounours, chacun s'exprime et est écouté.

La participation est pourtant un concept relativement structuré dont chacun -y compris ceux qui président aux destinées de la commune- devrait pouvoir mesurer les modalités de mise en oeuvre... mais ici, à chaque niveau de participation, le bât blesse.

Le niveau le plus élevé de la participation du public, c'est la co-décision ; n'en parlons même pas : même au sein du Conseil Municipal, elle serait inexistante, si l'on en croit les échos du dernier Conseil Municipal qui ont longtemps résonné dans la vallée lorsqu'un seul a réussi sans peine à faire valoir son point de vue à tous les élus -sauf un- en imposant la mise en oeuvre dès septembre 2013 d'une réforme que de nombreuses villes reportent pour se laisser le temps de la concertation.

Le niveau juste plus faible trouve à s'exprimer dans la consultation du public : en France, actuellement, c'est essentiellement lors des enquêtes publiques qu'on la rencontre. Un  exemple récent montre le "grand cas" qu'en fait la commune : la déclaration d'utilité publique des digues du Fragnès a été annulée en raison des insuffisances entachant le dossier élaboré par la commune, dès lors qu'elles ont porté atteinte à la connaissance, par le public, des tenants et aboutissants du projet.

Le niveau suivant, c'est la concertation : sur le dossier des rythmes scolaires, ceux qui ont participé aux réunions publiques "où tous les scénarios étaient ouverts" doivent, pour le moins, avoir du mal à digérer leur colère après s'être déplacés à une réunion dont la principale conclusion a été rejetée ; le message est clair: "choisissez la forme des miettes, mais l'épaisseur de la tranche, c'est moi qui la fixe".

Le niveau inférieur est l'information descendante : comme nous l'avons déjà relevé dans d'autres lignes, force est de constater que l'aspartame et le chlorure de potassium nous sont largement dispensés en pâles erzats du sucre et du sel des vicissitudes normales de la vie locale.

A un niveau plus bas encore se trouve... la communication des documents administratifs à la demande des administrés, régie par une loi de 1978, dont on fête donc cette année les 35 ans... Le temps d'une génération, en fait.

Et au fond du fond du fond de ce vaste champ se trouve enfin la communication des documents budgétaires, prévue pour sa part par une loi plus que centenaire puisqu'elle est déjà explicitement imposée par l'article 58 de la loi 5 avril 1884 sur l'administration communale !


Un refus de communication d'un document administratif, budgétaire et publié

C'est donc l'histoire d'un document projeté en séance du Conseil municipal détaillant les grands postes d'investissement de la commune... que la commune a refusé de transmettre.

Défendant bec et ongles le bien-fondé de son refus, celle-ci n'a pas hésité à affirmer:

  • que ce document n'était pas communicable... alors même qu'il avait été projeté en conseil municipal -on se refuse à croire que le nombre réduit des spectateurs lors de ces réunions a fini par convaincre les zélus que leur réunion se tenait à huis clos !
  • que ce document n'était pas définitif puisqu'il relevait de la procédure budgétaire dès lors que les dépenses ne sont certaines qu'une fois réalisées -cette fois, on doit espérer que ceux qui ont rédigé et signé une telle ânerie l'ont plus fait par tricherie intellectuelle que par méconnaissance réelle de ce qu'est un budget communal !
  • que le demandeur ne justifiait pas d'un intérêt à obtenir ce document -les termes pourtant dépourvus de toute ambiguïté de la loi de 1978 sur ce point n'ont donc pas suffi à convaincre !
  • que la communication de ce document risquerait de paralyser l'action communale -là, avouons le, on pense atteindre le fond !
  • qu'enfin, à d'autres que le demandeur, elle accepterait de le transmettre, mais là, non... -c'est vrai quoi, il y a les gentils et les méchants, et chez les Bisounours, seuls les gentils ont des droits civiques !

Le juge a, dans une décision du 12 mars dernier, balayé ces arguments d'un revers de manche ... et il a accompagné son mouvement d'une petite calotte : la commune est condamnée à verser 100 euros au requérant pour rembourser les frais qu'il a dû engager pour simplement espérer obtenir un jour un document qu'on aurait dû lui transmettre à première demande.


Espérons que cela servira de leçon... mais, en fait, j'en doute.


Emmanuel Wormser

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