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13 mars 2013

La genèse de la digue : le rapport des RTM de 1991

Relecture du rapport de présentation sur le plan d'exposition aux risques naturels prévisibles pour les communes de Bernin - Crolles - Lumbin - par le Service départemental RTM, 1991.

C'est le document le plus ancien qui nous a été communiqué par la commune de Crolles. Je n'ai photocopié que les extraits les plus utiles. A lire absolument pour comprendre que le projet de digue du Fragnès dans sa version 2013 est dans la continuité directe d'un rapport publié en 1991.


Le rapport RTM de 1991 est le document fondateur des aménagements de protection contre les chutes de blocs, même si "les trois communes ont déjà fait l'objet d'une cartographie des risques naturels en 1974 - 1975.  RTM 1991 - plan d'exposition aux risques naturels.pdf

Le coeur du rapport est constitué par une évaluation qualitative, secteur par secteur, de l'aléa "chute de blocs". Le RTM s'est appuyé sur des simulations par ordinateur pour estimer la probabilité qu'un bloc (une fois parti) arrive en pied de coteau. Pour les communes concernées, il s'agit très probablement des premières simulations de ce type.

On lira aussi avec intérêt les données socio-économiques sur la population et le parc de logements.

Les auteurs notent "la forte croissance de la population du fait de l'intérêt résidentiel" des trois communes. Ils observent que "le secteur agricole doit faire face à la forte demande d'urbanisation, celle-ci ne pouvant se développer qu'au détriment des surfaces agricoles". Ils constatent la déprise agricole et évoquent ce phénomène comme s'il était irréversible : " (...) forte baisse de la population agricole (...) l'abandon presque total de la viticulture sur les pentes d'éboulis a laissé la place successivement aux friches, aux bois et taillis que l'on observe aujourd'hui".

Du point de vue méthodologique, le document définit les notions clefs : Risque = Aléa x Vulnérabilité. Le lien entre le risque et l'urbanisation est clairement établi - page 24 : "Si dans le passé on a eu à déplorer que la destruction de cultures, aujourd'hui, compte-tenu de la plus grande densité de l'habitat et de sa progression vers le pied des parois (certaines villas sont situées au niveau des arrivées de blocs), la potentialité de destruction a augmenté".

Il est clairement précisé qu'il n'est question ici que du risque lié à la chute de blocs isolés ou de petits pans rocheux d'un volume inférieur à un millier de mètres cubes.

Cette restriction sera largement occultée par la suite. C'est ainsi que la notice explicative rédigée pour l'enquête publique de 2008 ne mentionne aucunement le risque d'éboulement en masse pourtant bien identifié dans le rapport RTM de 1991.

La conclusion sur les chutes de blocs est la suivante (page 72) : "Le risque de chutes de blocs est important sur les trois communes. Ce risque représente une menace sérieuse pour une partie du bâti actuel et futur des communes de Crolles et Lumbin (...) Les quelques dispositifs de protection passive (digues pare-blocs) existants ne protègent qu'une faible partie de l'habitat. Il y aurait donc lieu de compléter ces moyens de défense sur toute la longueur nécessaire (...)".

Il faut noter que les auteurs ne sont pas - ou peu - préoccupés par la distinction entre l'habitat existant et les terrains potentiellement constructibles. Au fil du rapport, on perçoit bien qu'il s'agit de protéger des secteurs considérés comme à urbaniser.

Un dernier mot de lecture critique : la conclusion reste strictement qualitative. "Le risque est important", voilà qui manque singulièrement de précision. A l'époque, on ne pouvait peut-être pas faire mieux. Mais il faut regretter que la notion de Vulnérabilité, mentionnée en introduction, disparaisse complètement de l'analyse. Les études ultérieures pour le plan de prévention des risques et la déclaration d'utilité publique ont conservé ces faiblesses initiales : le risque n'a jamais été qualifié plus sérieusement qu'en 1991 où il a été décrit comme étant "important".

Francis Odier 

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